le fabuleux savoir-vivre japonais

C’est fabuleux.
C’est fabuleux ce respect d’autrui que manifeste les Japonais. J’étais dans le train Shinkansen et à côté de moi était assis, côté fenêtre, un jeune homme japonais qui allait descendre au prochain arrêt. Il allait donc devoir “me déranger”. Il m’a regardé, a fait un salut de la tête à mon adresse pour s’excuser d’avance de me faire replier ma tablette pour sortir du train. Je m’exécute. Il sort dans le couloir du wagon se tourne vers moi et me salue encore.
Ce comportement peut paraître excessif dans mes yeux d’Occidental plus habitués aux gestes d’incivilités et aux requêtes “assertives” qu’à ces marques d’attention mais j’y reconnais une telle volonté de faciliter le vivre-ensemble que j’en reste admiratif.
Alors bien sûr cela peut être une forme d’hypocrisie, de façade de politesse et j’en viens à me demander ce qui se passerait si, pour l’expérience, je refusais de répondre favorable à sa demande.
Si je me pose la question, c’est à titre de parfaite hypothèse car, pour moi, ce savoir-vivre japonais est tout bonnement irrésistible.
Et si je compare cette attitude avec celle vécue aux États-Unis, je ne peux m’empêcher de sentir une immense différence.
L’autre jour, une Américaine, au guichet à côté du mien pour acheter un billet d’entrée s’adresse à la dame derrière le guichet et lui lance le si classique “How are you?” si répandu aux States. Il est tellement évident qu’elle n’est absolument pas intéressée de savoir si cette dame va bien aujourd’hui, si elle a bien dormi ou bien déjeuné. Cette question habituelle qui n’attend absolument pas de réponse résonne d’une telle futilité à mes yeux. Là, pour le coup, j’y lis de l’hypocrisie. Même si je sais que cela relève plutôt d’une forme de rituel de langage, de formule automatique prononcée sans plus y réfléchir, je ne peux m’empêcher de revenir à cet homme qui m’a salué avec un vrai regard en guise de vrai remerciement.
Je me souviens aussi d’avoir à plusieurs reprises senti que cette couche de politesse américaine, sympathique au premier abord, était particulièrement fine et faisait rapidement transparaître la possibilité de comportements plus “conflictuels”. Du genre: je suis sympa avec toi mais je suis armé alors tenons-nous en à ce protcole formel. Bien sûr, je ne veux pas généraliser. Mais j’ai néanmoins eu ce ressenti lors de quelques interactions heureusement fortement minoritaires durant mes quelques séjours aux States. Et ici, au Japon, après presque 3 semaines de séjour, jamais, à aucun moment je n’ai eu ne fut-ce que la plus infime sensation de quelque chose d’équivalent. Ce savoir-vivre japonais qui peut apparaître comme excessif semble tellement vécu de l’intérieur est un véritable plaisir de tous les instants.
Et c’est sans doute un élément à prendre en compte: ce comportement est véritablement généralisé.
Par contre il peut arriver que cela s’avère contre-productif.
Nous étions dans un restaurant en fin de soirée et avions commandé trois plats sans prétention dont une brochette de poitrine de poulet frit. Nous avons reçu les deux premiers plats et ne voyant pas venir la brochette, j’explique à la serveuse qu’elle n’a pas apporté la dite brochette mais que ce n’est pas grave car nous avons assez mangé et qu’elle pouvait apporter l’addition. La jeune fille nous a compris ou en tout cas a fait mine de nous comprendre puis s’est précipitée derrière le comptoir puis en cuisine pour finalement revenir vers nous avec la brochette de poulet non sans s’excuser à coup de multiples petits saluts comme pour s’excuser de cet inacceptable oubli de sa part.
Nous avons vécu plusieurs fois cette réaction qui laisse à entendre que nous avons été compris et de voir qu’ensuite la personne tente de trouver une solution qui montre que manifestement, elle n’avait pas vraiment saisi notre propos mais qu’il valait mieux agir que de laisser sous-entendre que nlus aurions pu mal nous exprimer.
Cela a donné lieu à plusieurs situations cocasses comme celle de la brochette de poulet et l’authentique désir de nous satisfaire ne pouvait que nous pousser à accepter la solution proposée même si ne correspondait pas à 100% à notre demande.
Le Japon est définitivement un univers culturel bourré de qualité et nous gagnerions à nous en inspirer.
(écrit dans le shinkansen de Hiroshima à Osaka le 28 avril à 11h40)

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