Il nous est facile de deviser sur des concepts tels que l’éternité, la souffrance ou l’impermanence. Tout passe, rien n’est épargné par le changement.

Tentant alors d’évoquer la fugacité des sculptures sur glace tant est il évident qu’elles ne résisteront pas aux quelques degrés au-dessus de zéro qui les ramènera à l’état liquide.

Nous nous plaisons alors à parler de notre mortalité. Nous l’évoquons en nous rappelant celles et ceux qui nous ont quittés. Diversion qui nous permet de simuler l’inconcevable: nous mourrons. Tout s’arrêtera. Nous ne serons même plus là.

Puis survient un drame comme celui qui a détruit la cathédrale Notre Dame de Paris. Et tout est chamboulé. Cette construction est inscrite dans la conscience collective, dans le patrimoine de l’humanité.

Architecture intemporelle, elle a connu Saint-Louis Et Napoléon. Et Victor Hugo. Et tant de générations d’hommes et de femmes.

Tel un poing rageur tendu vers le ciel, la cathédrale est le démenti de l’idée même d’impermanence. Elle, elle traverse le temps. Et la patine qu’il lui occasionne ne la rend que plus belle.

Puis il aura fallut une négligence. Une inattention de trop, une distraction commise par un quelconque anonyme, peut-être un ouvrier de l’entreprise en charge de la rénovation ou une défaillance technique pour que ce symbole de l’intemporel, cette matérialisation de la splendeur humaine traduite dans la pierre, le bois et le verre s’envole dans des volutes de fumée.

Et c’est alors la prise de conscience brutale.

Même ça!

Nos références sont bousculées, nos certitudes questionnées.

Expérience collective du sentiment de perte, communion d’émotion mêlée du si contemporain sentiment d’avoir été là, de l’avoir vécu. Comme le 11 septembre ou comme à la chute du mur de Berlin.

La flèche de Notre Dame qui s’écroule c’est l’immense clash du moment fugace qui détrône l’éternel. Ce qui était là et qui durait n’est plus.

Plus rien ne sera plus comme avant.

Bien sûr on la reconstruira, mais ce ne sera plus la même cathédrale.

Expérience cruelle et intense de l’humain, ce mortel conscient de sa propre mortalité. Refus de laisser un symbole du déni de sa propre finitude lui montrer que lui aussi, un jour, il se couchera et sombrera dans l’oubli.

source de l’image de ce post: https://twitter.com/LydiaGuirous/status/1117856313587818496