J’ai reconnu mon arbre

Cela fait plus de 7 années que je promène mon chien, quasi chaque jour, dans ce petit bois communal à côté de chez nous.

Et la semaine dernière, je l’ai découvert. Et reconnu.

Il faut dire que j’avais commencé la promenade en me mettant dans l’état d’esprit de résoudre une question d’organisation de mon travail et de mes passions. Il m’arrive ainsi de poser la question à mon subconscient puis de le laisser vaquer pour qu’il me glisse à l’oreille des pistes de solutions.

J’ai, ce jour-là, dévié de mes parcours habituels.

Et puis soudain.

Il était là.

Je ne me suis pas posé de question.

C’était lui.

C’est lui.

Oh, il n’est pas de ces arbres majestueux qui s’élancent vers le ciel avec cette arrogance végétale dont s’enrobent ces hêtres et ces chênes formidables.

Mon arbre est un pin ou quelque chose comme ça. C’est un arbre qui ne perd pas ses feuilles à l’automne (ça tombe bien je suis peu sensible aux saisons).

Mon arbre ne s’élance pas vers le ciel. Il a grandit en surmontant des difficultés. Il a ainsi développé plusieurs branches solides, de véritables troncs multiples qui émergent de la terre puis se diversifient dans l’espace en étalant son feuillage vert foncé avec une relative discrétion.

En observant ses branches, je ne compte pas les cicatrices qui témoignage de son opiniâtreté à vaincre les accidents de la vie que son destin a dressé sur son parcours.

Cet arbre n’est pas un tronc qui étale, là-haut son feuillage. Il se compose de plusieurs troncs eux-mêmes débouchant sur de multiples branchages. J’y reconnais mes multiples passions qui partent dans tous les sens. Chaque branche a sa propre orientation et un sérieux sentiment de cafouillis s’empare de nos esprits lorsqu’on l’observe. Mais à bien y regarder, ce désordre manifeste révèle une structure puissante qui produit un effet puissant. Ces branches et leur feuillage couvrent une surface importante. Elles donnent à l’arbre son volume. Sa densité.

Mon arbre ne se fait pas remarquer. Ou pas trop.

Il est en état permanent d’explorateur de son espace. Aucune direction n’est négligée.

Contrairement aux arbres voisins qui s’élèvent vers le ciel, mon arbre ne cherche pas à faire de l’ombre. Il préfère offrir un espace plus ramassé qui sera accueillant pour les divers animaux qui peuplent ce petit bois.

Depuis notre rencontre, je suis allé lui rendre visite plusieurs fois.

J’aime son silence. Il en crée un en moi.

Mon arbre est sur un terrain en pente. Un de ses troncs est quasi horizontal. Vis-à-vis de la pente, il s’en écarte. Mais pas trop. En pratique, il est horizontal.
J’ai testé sa solidité et il l’est.

Son apparente fragilité n’est qu’une apparence.

Mon arbre a une histoire. Je le sens fier d’être là. Fier de ce qu’il a réalisé jusqu’ici.

Mon arbre n’est pas un fils de .. comme ces jeunes chênes qui n’ont que faire de ce qui se passe près du sol.

Mon arbre est pragmatique. Il n’a que faire de cette course à qui sera le plus haut.

Mon arbre a traversé des crises et ce qu’il est devenu, il ne le doit qu’à lui-même.

Et depuis notre rencontre, je me suis demandé: “mais pourquoi ne choisirais-je pas un autre arbre? Un plus beau, un plus grand?

Et en fait la question ne se pose pas.

Car je n’ai pas choisi mon arbre.

C’est lui qui m’a choisi.


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